Une spiritualité méditerranéenne?
Islam, soufisme et contact interreligieux dans l’histoire de la Méditerranée
Conférence du 21 mars 2017
École Centrale Marseille
<>Qu’est-ce que le soufisme aujourd’hui et quels rôles peut-il jouer dans nos sociétés contemporaines, sur les rives de la Méditerranée ? « Océan sans rivages », comme on l’a souvent défini, cet ensemble complexe, aux traditions plurales (croyances et pratiques) échappe à toute tentative de représentation simpliste ou « essentialiste » : véritable esprit de l’islam ou bien spiritualité post-islamique ? Sagesse pérenne ou superstition du passé ? Espace de recherche intérieure ou foi aveugle dans les saints et dans leurs miracles ? Trace sclérosée d’un temps révolu, ou révolte spirituelle contre un monde déshumanisé ?
Ce qui est assuré, c’est que le soufisme ne cesse d’être une force majeure dans la vie spirituelle et sociale de millions de musulmans et musulmanes partout dans le monde, tout comme il l’a été dès les premiers siècles de l’islam, et qu’il est en train de gagner du terrain en Occident.
Une résilience qui paraît d’autant plus surprenante, quand on considère que la « mort imminente » du soufisme avait souvent été préconisée, dès la fin du XIXe siècle jusqu’à une époque très récente, par nombre d’observateurs et d’intellectuels sur les deux côtés de la Méditerranée. En effet, des facteurs puissants semblaient devoir entraîner sa marginalisation progressive : d’une part, la diffusion de mentalités rationalistes dévalorisant le spirituel ; d’autre part, la montée de forces fondamentalistes, hostiles au soufisme, au sein de l’islam ; enfin, un certain embarras de tant d’autorités étatiques et religieuses de pays musulmans face à des manifestations de « piété populaire » souvent regardées comme superstitieuses ou contraires à la décence. C’était toutefois une mort trop tôt annoncée. En plein XXIe siècle, le soufisme, et les soufis, montrent une vivacité et une capacité d’adaptation insoupçonnées. Quelles sont les formes de cette adaptation ?
Quels rôles les différentes voies soufies vont jouer dans les contextes plurireligieux et multiculturels des sociétés méditerranéennes ? Quels contributions le soufisme, et les soufis, peuvent apporter à la construction d’un tissu de dialogue et d’ouverture interreligieuse sur les différents rivages de notre « mer commune » ?
Loin de vouloir donner la réponse à de telles questions, Giuseppe Cecere et Sylvie Denoix essaieront plutôt de les mettre en perspective en explorant le présent à la lumière d’une histoire plus que millénaire et d’un débat historiographique sans cesse renouvelé.